J'ai vu dans la journée l'opération transfert de fonds , dans une rue tranquille, un fourgon de convoyeurs de fonds est garé sur le trottoir d'une petite succursale de Banco do Brasil , sort un type avec une sacoche à la main, qu'un autre couvre, mitraillette au poing, l'air pas commode, fusillant du regard les alentours. La violence urbaine est toujours présente, en filigrane ou plus tangente, à 3 rues de la maison, un chauffeur de taxi vient de se faire abattre.
Autre type de violence, l'injustice, un graffiti avec dessin du cangaceiro couvre le mur à côté d'un arrêt d'autobus, "ça arrive aujourd'hui, comme ça arrivait du temps de Lampião".
On reprend le musée de l'homme du Nordeste, à la sortie, aprés la salle où est exposé un carrosse, j'engage la conversation avec un bon gros sympa, Edilson qui, normalement, travaille au premier étage sur l'histoire de la région mais il vient de servir de guide à deux aveugles qu'il a accompagnés, leur faisant toucher les objets, leur donnant des explications dont j'ai profité moi aussi. Tout jeune , il a vécu à Bruxelles et il n'a qu'une envie c'est d'y retourner mais sur le plan finance pour lui ça vient après l'appart qu'il veut arranger et une opération de réduction d'estomac, c'est pas pour tout de suite. Les Brésiliens jonglent perpétuellement avec leurs cartes de crédit et les paiements échelonnés. Edilson m'explique qu'en fait la bibliothèque de la fondation Joaquim Nabuco se trouve à 2 km de là, près de la Fondation Gilberto Freyre et qu'elle va être fermée jusqu'au lundi 5 janvier.
Qui est Gilberto Freyre (1900-1987)? Un anthropologue, sociologue et auteur d'un ouvrage polémique "Casa Grande e Senzala" publié en 1933 sur la vie dans les plantations de canne à sucre du Pernambouc (en français paru sous le titre de "Maîtres et esclaves"), très étonnant selon certains car Freyre était assez réac. Allez je ne vais pas résister à l'envie de mettre quelques mots de Darci Ribeiro qui, pour moi, reflétent bien la réalité du Nordeste. « Maîtres et esclaves est le plus grand des livres brésiliens et le plus brésilien des essais. Pourquoi ? J’ai toujours été surpris et je le suis encore, de ce que Gilberto Freyre, tout en étant si étroitement réactionnaire sur le plan politique, ait pu écrire ce livre généreux, tolérant, beau et fort. Ce qui est certain, c’est que Maîtres et esclaves nous a appris, en particulier, à nous réconcilier avec notre “ancestralité” lusitanienne et nègre dont nous étions quelque peu honteux. Nous lui devons le fait d’avoir commencé à accepter, en tant qu’authentiques ancêtres, le peuple que nous avions l’habitude d’identifier à l’immigrant, bête de somme tirant les charrettes du marché, ou bien commerçant prospère et mesquin lorsqu’il s’était enrichi. Nous devons avant tout à Gilberto Frevre, d’avoir appris à reconnaître, sinon avec fierté, du moins avec sérénité, sur le visage de chacun de nous, sur celui de nos oncles et cousins, une bouche charnue, des cheveux crépus ou ces nez épatés d’origine incontestablement africaine et servile. » (Darcy Ribeiro, extrait du prologue à une réédition en 1979 du livre de Gilberto Freyre, traduit par Inês Oseki-Dépré, dans le Magazine littéraire n°187, 1982).
Tour au parc de Jaqueira, tout illuminé par les décos de fin d'année, au fond du parc une créche avec des personnages en jonc tressé.
Je sais que je me répète mais il fait une chaleur infernale.
J'ai eu une réponse de Unicordel, l'association qui regroupe les cordelistes du Pernambouc, on va se voir le 10 janvier dans un des marchés de la ville. Je suis en train de me tâter pour aller à Fernando de Noronha, l'archipel au large de Natal et si bien préservé sur le plan environnemental, où chaque touriste doit s'acquitter d'une taxe par jour passé sur l'île.
J'aimerais aussi aller au Forum Mondial qui va avoir lieu à Belém en février mais c'est loin.
Ça a commencé à crépiter un peu partout dès ce matin, rendez-vous à la plage pour changer d'année, le podium est installé.