On a rendez-vous au marché de Boa Vista à 10h du mat, c'est José Honório, le président de l'assoc Unicordel qui m'accueille, le temps qu'on nous installe des chaises et une table car le bar de Leleu démarre sa journée, puis petit à petit, d'autres cordelistes vont nous rejoindre. Je plonge dans l'historique du groupe, l'idée est venue de lui ici-même un matin comme aujourd'hui, il en a parlé aux cordelistes qui étaient là et c'était parti , il y a de ça 3 ans, leur but c'était de défendre et promouvoir la poésie populaire et son oralité , de proposer des interventions et récitals sur les marchés, dans les écoles, etc. L'association regroupe cordelistes, poètes, récitants , éditeurs et chercheurs d'un peu partout dans l'état de Pernambouc. Ce n'est que depuis septembre de l'année derniére qu'ils se sont déclarés légalement comme association, ce qui leur permet de pouvoir prétendre à un soutien de la part de la mairie de Recife. José me cite, entre autres réalisations, le début d'une collection "Arrecifes do cordel" lancée en octobre 2008 avec le tome 1 sur les movimentos sociais , le livre, que j'avais vu en librairie la semaine dernière, se compose de 10 cordels de 10 auteurs différents. Autre chose à leur actif, le CD Cordas e Cordéis do Recife que José m'offre ainsi que quelques-uns de ses folhetos.
Pour lui, l'aventure a commencé avec la tradition qui existait dans sa famille de lire des cordels de là il est passé à en écrire à l'âge de 17 ans mais sans chercher à les publier et puis de fil en aiguille, le cordel a pris sa place dans sa vie mais comme des tas d'autres, il n'en vit pas. Dans les derniers qu'il a écrits, il me parle de "O interior de hoje em dia" , réflexion sur la globalisation et la culture, du duel cybernétique avec Mauro Machado mais aussi d'une commande pour un mariage tiré à 150 exemplaires. On en vient donc à parler de tirages et si c'est l'auteur lui-même qui assume les frais d'édition, il en fait tirer 50 exemplaires, dans les autres cas, le minimum c'est 1000. Et évidemment à évoquer le coût de publication, on glisse sur le terrain de la xylogravure qu'il ne défend pas de maniére acharnée car tout d'abord, on n'est pas forcément doué pour le dessin, et si on commande une xylogravure cela revient cher, à l'heure actuelle certains poétes s'inspirent des xylogravures pour faire leurs dessins mais pour lui le dessin est beaucoup plus pratique et peut être digitalisé.
En ce moment le grand sujet qui occupe Unicordel c'est le carnaval , depuis 3 ans ils le célèbrent avec Cordel em Folia, ça va être d'ailleurs le principal point de la réunion à laquelle j'assiste un peu plus tard.
Mais pour l'instant, Erica Montenegro arrive avec comme cadeau pour moi, plusieurs de ses cordels, elle travaille comme prof de FP (formation professionnelle) et m'explique que la fonction didactique du cordel est actuellement remise en question. Pour la petite histoire c'est une amie qui lui a donné son premier cordel puis montré comment en écrire un , alors elle a fait parler son grand-père pour pouvoir en faire un sur lui à l'occasion de son anniversaire, le jour J est arrivé et elle a commencé à lire jusqu'au moment où elle a dit Et il fut bien triste le jour où son frère José mourut , mais il y a eu comme un blanc car José,bien vivant, était dans la salle , elle s'était trompé de frère. Elle a aussi écrit pour son beau-père, ce qui l'a ému aux larmes. En classe , elle peut faire dessiner ses éléves à partir d'un de ses cordels comme celui sur la pluie ou faire tout un travail avec eux comme ça a été le cas pour la discrimination raciale car le problème existait pour certains dans sa classe. Susana Morais se joint à nous, elle est enceinte de 3 mois et se plaint des nausées qu'elle a le plus souvent le matin , avec l'arrivée de Danielle Almeida et d'Altair Leal, ça s'anime encore plus, Susana c'est la cordeliste la plus ancienne du groupe, elle a participé à la création d'Unicordel, elle fait parfois des duels poétiques et virtuels. Elle nous raconte que quand elle a écrit "Conselho de amiga" en pensant à une amie, plus d'une autre a pensé que cela avait été fait spécialement à son intention. Daniella, elle, n'écrit pas depuis longtemps, elle a fait 3 cordels mais a lancé le début d'une série "Vou de mochila" (je pars, sac au dos) avec le voyage qu'elle a fait en Bolivie et elle compte la continuer avec ses futurs voyages. En blaguant, toutes les deux disent que si elles ont commencé à écrire c'est de la faute à... Altair pour Daniella et Honório pour Susana qui se sont mis à parler en vers et puis il l'a défiée pour un duel par mail et elle y a pris goût.
Le dimanche, à midi, dans 2 marchés de la ville, il y avait des récitals de poésie mais celui du marché de Madalena a été suspendu temporairement. Ce dimanche à midi, doit intervenir Allan Sales, membre du groupe mais j'y arrive un peu tard et il n'est plus là. Celui qui lui a succédé chante en espagnol , accompagné d'un guitariste puis intervient un autre , en solo.